Réforme du droit civil des successions : qui est tenu au rapport des donations que le défunt a consenties de son vivant ?

Maître Julie Van Themsche, avocate au barreau de Liège

Les grandes lignes de cette réforme sont détaillées ici. La loi du 31 juillet 2017 (publiée au M.B. du 1er septembre 2017, ci-après dénommée, "la Loi") a profondément modifié le droit des successions et des libéralités, notamment autour de trois axes :

  1. modification des règles en matière de rapport des libéralités;
     
  2. modification des règles relatives à la réserve;
     
  3. instauration des pactes successoraux.

Dans les lignes qui suivent, nous mettrons en évidence les règles qui déterminent qui est tenu au rapport.

Qu’est-ce que le "rapport"?

Le rapport est l’obligation pour les successibles ab intestat (c'est-à-dire décédés sans testament) de rapporter à la masse successorale les donations qu’ils ont reçues du vivant du donateur afin de reconstituer la masse à partager entre les héritiers. L’objectif sous-jacent du rapport est le traitement égalitaire des héritiers.

Le caractère rapportable ou non d’une donation dépend de la loi et de la volonté exprimée par le donateur dans l’acte de donation.

Qui sera tenu au rapport dans le cadre des nouvelles règles mises en oeuvre dans le cadre de la réforme ?

1. Les descendants ?

 Oui, sauf si la donation a été consentie avec dispense de rapport prévue par le donateur ("donation par préciput et hors part").

2. Les autres héritiers ab intestat (frère, sœur, oncle, tante,… excepté le conjoint) ?

Non, sauf si l’obligation de rapport est imposée par le donateur dans l’acte de donation.

3. Le descendant qui vient en substitution d’un donataire prédécédé, renonçant ou indigne ?

Est notamment visée la situation dans laquelle le petit-fils du défunt vient à la succession de son grand-père en substitution de son père prédécédé.

Il devra rapporter les donations qu’il a reçues ainsi que les donations que son père a reçues, sauf si les donations ont été consenties avec dispense de rapport, et ce même s’il a renoncé à la succession de son père.

4. Le conjoint et le cohabitant légal ?

Ils ne sont plus tenus au rapport. En contrepartie, ils ne peuvent plus exiger des autres héritiers ab intestat le rapport des donations que ces derniers ont reçues.

5. Le rapport pour autrui en ligne descendante ?

La situation visée est la suivante : B a un fils A qui a lui-même un fils C. B fait une donation à C que A s’engage à rapporter.

L’enfant du donateur (A) peut rapporter la donation qui est réalisée en faveur de son propre enfant (C). En l’espèce, A pourra rapporter dans le cadre de la succession de B la donation que B a consentie à C.

Toutefois, le rapport pour autrui est soumis aux conditions suivantes :
 

a)   une convention tripartite;
 

b)  celui qui s’engage au rapport pour autrui (A) doit accepter la succession du donateur (B).

Dans les liens entre le donataire (C) et celui qui s’est engagé au rapport pour autrui (A), le rapport sera considéré comme une donation indirecte entre celui qui exécute le rapport (A) et le donataire (C) lors du décès du premier.

 

Les nouvelles règles s’appliqueront aux successions qui s’ouvriront à partir du 1er septembre 2018, et ce même à l’égard des donations réalisées avant le 1e septembre 2018. Toutefois, les anciennes règles sont maintenues pour la qualification donnée aux donations antérieures (donation en avance d’hoiries ou donation par préciput et hors part).